La crise vénézuélienne relance la problématique du pétrole et de l’or

Date: 31 janvier, 2019 - Blog

Les cours du pétrole sont remontés récemment, les investisseurs craignant que la crise vénézuélienne affecte l’offre mondiale.

A court terme, on ne pense pas qu’une crise au Venezuela provoque une hausse majeure des cours du brut. La production vénézuélienne n’a cessé de chuter depuis 1998, passant de 3.5 millions barils/jour à 1.2 aujourd’hui, avec une baisse importante ces 3 dernières années à cause d’une détérioration de l’outil de production. Voir graphique. S’il y a un impact, il s’observera plutôt sur le WTI et moins sur le Brent, car le Venezuela est le 4ème importateur de pétrole des Etats-Unis et exporte 45% de sa production vers les Etats-Unis. Et la situation globale est moins critique aujourd’hui, car la progression de la demande est moins forte en raison du ralentissement économique global.

Production de pétrole au Venezuela (rouge) et OPEP (noir). En décembre 2002 et janvier 2003, la grève générale chez PDVSA pour faire chuter Hugo Chavez avait conduit à un arrêt de la production vénézuélienne

Par contre, à moyen-long terme, le Venezuela reste un facteur baissier sur les prix du pétrole, car il pourrait revenir sur le marché mondial avec au moins 2 millions de barils/jour lorsque les équipements de production seront remis en état de marche. Le Venezuela détient 18% des réserves mondiales prouvées avec 300 milliards de barils, suivi de l’Arabie saoudite (270), l’Irak et l’Iran ; mais les réserves vénézuéliennes sont essentiellement du pétrole extra-lourd venant des sables bitumeux de l’Orénoque.

L’or poursuit sa remontée, de $1’180 en été 2018 à $1’302 aujourd’hui. Le cours de l’or est favorisé par la baisse des taux d’intérêt réels, la stabilisation du dollar, l’état du monde, la volatilité des marchés financiers et la peur d’une récession. La dédollarisation pousse les banques centrales émergentes à augmenter  la part de l’or dans leurs réserves étrangères, la Russie, la Turquie et le Kazakhstan en tête, la Pologne et la   tout récemment. Entre 2017 et le 1er semestre 2018, le « succès » du bitcoin et autres cryptomonnaies avait  retiré de la demande pour l’or. Aujourd’hui, la « cryptodésillusion » pousse les investisseurs à revenir sur l’or.

Mais la crise vénézuélienne n’est peut-être pas étrangère à la hausse de l’or au-dessus des $1’300. Le régime de Maduro essaie de rapatrier $1.2 milliard d’or stocké auprès de la Banque centrale d’Angleterre, mais la BoE s’oppose à ce rapatriement dans le contexte des  mesures américaines cherchant à bloquer les actifs du Venezuela situés à l’étranger. L’or est une part importante des réserves étrangères vénézuéliennes: il  compte pour 77% des réserves totales.

Avec le refus de la BoE de restituer  l’or vénézuélien, revient l’incessante question : l’or entreposé dans les banques centrales est-il bien là ? En 2012, l’Allemagne décidait de rapatrier une partie de son or entreposé  à Fort Knox, mais les Etats-Unis avaient refusé ; officiellement, la Fed mettait en avant les coûts de transport et de sécurité. Finalement, en 2014, l’Allemagne renonçait au rapatriement, considérant que son or était à l’abri aux Etats-Unis. Selon une étude du Fonds monétaire, 80% des banques centrales auraient loué 15% de leurs réserves d’or à des prestataires extérieurs.

Une étude de HSBC rappelle que les 3 meilleurs actifs-refuge dans des marchés financiers volatils  et l’incertitude économique sont dans l’ordre le 10 ans US, le yen et l’or. Le franc suisse a perdu de son caractère d’actif-refuge star depuis la création de l’euro.

Dans une allocation tactique diversifiée, on privilégie le 10 ans US et l’or comme actifs de protection, en alternant notre positionnement selon la situation. En septembre dernier, on a rallongé la duration lorsque le 10 ans US a touché les 3.25%, puis récemment on a réduit cette duration vers les 2.70% pour surpondérer l’or.

Asset allocation: En fin de cycle (courbe des taux inversée), l’or mérite une pondération plus importante

La consolidation dans le secteur aurifère (Barrick avec Randgold, Newmont avec Goldcorp et des rumeurs de Goldfield avec Anglo Gold), signale-t-elle des jours meilleurs pour l’or ? La hausse conjuguée du pétrole et de l’or, annonce -t-elle de nouvelles politiques de reflation, en  Chine, et/ou un dollar plus faible dans les prochains mois ?

  • Pétrole : un point d’équilibre producteur-consommateur autour de $75 le Brent semble le plus probable
  • Or : retour en grâce d’un actif-refuge incontournable
  • Dans un portefeuille équilibré, privilégier l’or à la duration du Trésor  US