Date: 4 octobre, 2018 - Blog
Depuis début 2016, où le prix du baril de Brent se situait à $28, nous avons régulièrement révisé à la hausse nos estimations du prix du brut, considérant que des prix si bas n’étaient pas tenables pour les budgets des pays producteurs de pétrole et que le couple offre/demande allait se rééquilibrer.
Le prix de $80 pour le baril de Brent n’est donc pas une surprise. Mais aujourd’hui, les estimations, poussées par quelques grandes banques d’investissement, commencent à se diriger vers un baril à $100 à l’approche du 4 novembre, début des sanctions US sur les exportations de pétrole iranien.
Il est aussi possible que des pays-producteurs de l’OPEP veulent s’ingérer dans les ¨mid-term¨, pour ¨punir¨ Donald Trump qui ne cesse d’accabler ces pays depuis trois mois, considérant qu’ils manipulent les prix du brut. Ces pays-producteurs chercheraient à faire monter le prix du gallon aux Etats-Unis, afin de pénaliser les ménages américains et ainsi favoriser une victoire démocrate.
La puissance de l’OPEP avec 34% de la production mondiale lui permet de maîtriser les cours du pétrole, en maintenant sa production entre 32-34 millions barils/jour depuis des années, alors que la production US est passée de 5 millions de b/j en 2008 à 11 millions b/j aujourd’hui. La demande ne cesse de progresser et depuis 2017 l’offre ne suffit plus à répondre à la demande. Les reproches de Donald Trump sont recevables, puisque l’OPEP, en premier lieu l’Arabie saoudite, a les capacités de production pour combler le déficit d’offre.
La demande mondiale se situait à 97.2 millions b/j en 2017, et passera à 98.8 mios b/j (+1.7%) en 2018 et 100.2 mios b/j (+1.4%) en 2019 soutenue par les Etats-Unis, la Chine, l’Inde et l’Afrique. On escompte un déficit d’offre en 2018 et 2019.
Une hausse des prix du pétrole au-delà de $100 le baril pourrait avoir un impact négatif sur la croissance économique globale et les pays-consommateurs, et pour les sociétés pétrolières, provoquer un recul de la demande de pétrole et une concurrence plus forte en raison de l’activation des projets dormants de production non-conventionnelle.
Au niveau de l’offre, il y a donc 3 problèmes :
- L’OPEP, et l’Arabie saoudite en tête, ne veulent pas augmenter leur production. L’échec/le retard de l’entrée en bourse d’Aramco explique aussi la volonté des Saoudiens de garder les prix du pétrole élevés.
- Les sanctions US sur le pétrole iranien pourraient enlever dès le 4 novembre plus d’un million de b/j sur le marché mondial. C’est considérable. Les effets se font déjà sentir, puisque l’Iran, qui était revenu à une production de 3.8 mios b/j, a vu sa production chuter à 3.5 mios b/j au mois d’août.
- La faillite du Venezuela est aussi une source de tensions sur les prix. En 2010, la production vénézuélienne se situait à 2.5 mios b/j pour descendre à 2.1 en 2016, puis 1.5 au 1er semestre 2018, et 1.2 aujourd’hui.
La production US, qui semblait marquer le pas entre juin et août en raison de sous-capacités des infrastructures (pipelines) pour le transport du pétrole entre les sites de production et les terminaux de stockage et de raffinage sur les côtes, est repartie à la hausse en septembre malgré une stabilisation du nombre de plateformes de forage en activité. Voir graphiques.
Malgré les sources de tensions, nous ne pensons pas que le prix du baril de Brent atteigne les $100. Le retour de balancier pourrait être douloureux pour l’OPEP. L’Arabie saoudite a la clef pour éviter une crise dans les pays-consommateurs. Contrairement aux métaux industriels dont les prix sont influencés par la croissance économique et par l’offre, dépendante de la rentabilité des investissements, la composante politique est importante dans l’évolution du prix du pétrole.
Par contre, il est vrai qu’une escalade militaire au Moyen-Orient pourrait se traduire par une hausse des prix du pétrole, mais cela ne sera pas $100, mais bien plus. Les Etats-Unis ont confirmé toutes les options concernant le Venezuela; si le régime Maduro devait tomber, nous considérons, après le choc à court terme, que cela serait réduirait les tensions sur les prix, car la production vénézuélienne reviendrait progressivement sur les niveaux d’avant-crise.
Un autre facteur positif pour le pétrole est la hausse des cours, alors que les positions spéculatives « longues » sont en train d’être fermées par les hedge funds. Les fondamentaux dominent donc la tendance haussière des prix du pétrole.
- A court terme, le facteur dominant est les sanctions US sur les exportations de pétrole iranien
- Nous maintenons notre estimation d’un cours du Brent à $70-80 en 2019, mais nous n’adhérons pas (encore) au scénario des $100 le baril